Installer une terrasse, un étalage ou un food-truck sur le trottoir ne s’improvise pas. En France, l’occupation d’une portion de l’espace public à des fins commerciales nécessite une autorisation spécifique appelée AOT – pour autorisation d’occupation temporaire du domaine public. Cette démarche, payante, peut vite devenir un casse-tête administratif pour les commerçants mal préparés. Voici ce qu’il faut savoir, sans détour, pour éviter les mauvaises surprises.
3 types d’autorisations possibles
L’AOT se décline en 3 catégories, selon la nature de votre activité et l’installation envisagée :
- le permis de stationnement : pour les terrasses ouvertes, les étalages mobiles, les food-trucks ou les installations foraines sans ancrage au sol.
- la permission de voirie : pour les structures fixes comme les terrasses fermées ou les kiosques.
- le droit de place : pour les emplacements sur les marchés ou dans les halles couvertes.
Chaque formule répond à des conditions précises, fixées par la commune, avec une tarification distincte.
Qui est concerné par le permis de stationnement
Sont notamment visés :
- les bars, cafés et restaurants avec terrasse ouverte (mobilier démontable, circulation piétonne maintenue),
- les commerçants disposant d’un étalage ou d’un équipement mobile collé à leur façade (glacier, crêpier, rôtisserie, etc.),
- les food-trucks,
- les forains.
Attention : les comptoirs de vente rapide (boulangerie, sandwicherie, etc.) où la clientèle reste sur le trottoir sans installation supplémentaire ne sont pas soumis à l’AOT.
Conditions d’occupation de l’espace public
L’installation ne doit en aucun cas gêner la circulation des piétons, y compris les personnes à mobilité réduite ou malvoyantes. Il faut également :
- laisser l’accès libre aux immeubles voisins,
- préserver la tranquillité du voisinage,
- respecter strictement les dates et horaires d’exploitation,
- se conformer aux règles d’hygiène (chaîne du froid, protection des aliments),
- ne pas installer de chauffage ou de climatisation sur une terrasse ouverte.
Les communes publient souvent une charte locale d’occupation commerciale détaillant les règles à respecter. Ce document est consultable en ligne ou en mairie.
Procédure de demande d’AOT : les étapes à suivre
Le dossier à constituer dépend de votre commune. Il peut s’agir d’un formulaire spécifique ou du Cerfa n°14023, disponible sur le site Service-Public.
Les pièces à fournir incluent généralement :
- un extrait Kbis ou RNE à jour,
- la licence d’exploitation (pour les débits de boissons),
- le bail commercial ou le titre de propriété,
- une attestation d’assurance couvrant l’occupation du domaine public,
- un descriptif précis avec plan d’implantation et superficie,
- un relevé d’identité bancaire.
Le dépôt s’effectue auprès de la mairie (ou de la préfecture pour certaines grandes artères). Par précaution, privilégiez l’envoi en recommandé avec accusé de réception.
Délais et réponse de l’administration
Le traitement du dossier varie de 2 semaines à 1 mois. Sans réponse sous 2 mois, la demande est réputée refusée. Une autorisation donnée par un comité des fêtes ou une association n’a aucune valeur juridique.
Caractéristiques de l’autorisation AOT
L’autorisation est :
- personnelle : elle ne peut être ni vendue, ni cédée, ni sous-louée,
- limitée dans le temps : valable le plus souvent un an ou une saison, avec possibilité de renouvellement,
- précaire et révocable : la commune peut l’annuler à tout moment, sans indemnisation, notamment pour des travaux ou une manifestation locale.
Elle prend la forme d’un arrêté municipal ou préfectoral, affiché en mairie pendant au moins deux mois.
Quel est le coût d’une AOT ?
L’occupation du domaine public est soumise à une redevance appelée droit de voirie, dont le montant est fixé par la commune. Le tarif varie selon :
- la superficie occupée,
- la durée d’occupation (annuelle ou saisonnière),
- la valeur commerciale de la rue.
L’installation sans autorisation, ou en dehors des conditions prévues, expose à une amende de 1 500 €.
Que faire en cas de cession du fonds de commerce ?
L’autorisation d’AOT n’est pas transférable. En cas de vente du fonds, le nouvel exploitant doit refaire une demande complète. Il devra joindre au dossier une preuve de la cession (titre de propriété ou bail commercial actualisé).
Une demande anticipée est possible, mais n’a aucune valeur contractuelle.
Pour les terrasses fermées ou les kiosques : la permission de voirie
Les commerces installant des structures fixes et ancrées au sol doivent solliciter une permission de voirie. Cela concerne :
- les terrasses fermées des restaurants et cafés,
- les kiosques type presse.
À la différence des installations mobiles, ces structures peuvent légalement accueillir un chauffage ou une climatisation.
Le dossier à fournir comprend notamment :
- un plan de situation (1/10 000 ou 1/20 000),
- un plan d’implantation précis (1/1 000 ou 1/2 000),
- des photographies du site.
Des documents complémentaires peuvent être exigés selon la commune.
Vendre sur les marchés ou dans une halle : le droit de place
Les commerçants souhaitant installer un stand sur un marché ou dans une halle doivent demander un emplacement auprès de la mairie, du placier municipal ou de l’organisateur. En cas d’accord, une redevance spécifique est à payer : le droit de place.
En résumé, avant d’occuper le trottoir, un square ou un marché, prenez le temps de bien identifier le type d’AOT qui vous concerne. Ne sous-estimez pas la rigueur de l’administration locale : la moindre erreur ou omission peut vous coûter cher, tant en délai qu’en pénalités. L’AOT est un outil indispensable pour de nombreux commerçants, mais elle repose sur une précarité juridique constante. La commune peut vous retirer votre autorisation du jour au lendemain, sans explication ni compensation. Un exemple parfait de l’« esprit français » dans toute sa splendeur bureaucratique.