La répartition des charges d’ascenseur en copropriété

Quand il s’agit de la répartition des charges d’ascenseur, nombreux sont les copropriétaires qui découvrent, parfois trop tard, que les règles en vigueur ne tiennent pas toujours compte de la réalité de l’usage. Un règlement de copropriété mal conçu peut entraîner des injustices flagrantes, avec des copropriétaires du premier étage payant autant que ceux du dernier, voire des occupants du rez-de-chaussée contraints de financer un équipement dont ils n’ont aucune utilité. Retour sur une problématique qui peut rapidement alourdir la facture.

Un principe clair en théorie, souvent bafoué en pratique

La loi est pourtant explicite : la répartition des charges d’ascenseur doit se faire en fonction de l’utilité objective de l’équipement pour chaque lot (article 10, al.1 de la loi du 10 juillet 1965). Autrement dit, plus un copropriétaire habite haut, plus il est censé payer. Ce principe est confirmé par la jurisprudence qui rappelle que cette disposition est d’ordre public et ne peut être contournée (Cass. civ. 3e, 9 mai 2019, n° 18-17.334).

Cependant, de nombreux règlements de copropriété anciens ne prévoient aucun coefficient d’étage. Résultat : une répartition parfois équivalente entre des lots situés à des hauteurs différentes, au mépris du principe d’utilité. Ceux qui en pâtissent le plus sont les copropriétaires des étages inférieurs, qui payent autant que leurs voisins des derniers niveaux.

Un problème récurrent : les lots en rez-de-chaussée

Pour les occupants du rez-de-chaussée, la situation est encore plus aberrante : si l’ascenseur ne dessert pas un espace qu’ils utilisent (cave, parking…), ils ne devraient pas avoir à payer de charges d’ascenseur. Une clause du règlement de copropriété leur attribuant une quote-part des frais serait d’ailleurs considérée comme non écrite et nulle juridiquement (Cass. civ. 3e, 2 mars 2005, n° 03-16.731).

En revanche, dès lors que l’ascenseur dessert un sous-sol où ces copropriétaires possèdent une cave ou un box, ils sont redevables d’une partie des charges (Cass. civ. 3e, 20 mars 1991, n° 89-17.336).

Des contestations possibles, mais sous conditions

Pour ceux qui se sentent lésés, il existe 2 voies de recours :

  • L’action en annulation, qui peut être exercée à tout moment et qui permet d’éliminer une répartition contraire au critère d’utilité.
  • L’action en révision, qui ne concerne que les cas où la quote-part d’un copropriétaire diffère de plus de 25 % de ce qu’elle devrait être dans une répartition normale. Cette action doit être intentée dans les 5 ans suivant la publication du règlement de copropriété ou dans les 2 ans suivant la première vente d’un lot (art. 53 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 et art. 12 de la loi du 10 juillet 1965). Passé ces délais, toute contestation devient très compliquée.

Si une action est recevable, c’est alors au juge de déterminer une nouvelle grille de répartition des charges, sans effet rétroactif.

Voir également: dans quels cas ne pas payer ses charges ?

Revoir la répartition : un processus coûteux mais parfois indispensable

Modifier la grille des charges d’ascenseur d’une copropriété n’est pas une mince affaire. Le recours à un géomètre-expert est souvent nécessaire, bien qu’il n’ait pas le monopole de cette mission. Une telle démarche implique des frais pouvant atteindre 10 000 euros (honoraires, frais d’avocat et publication du nouveau règlement de copropriété compris).

La nouvelle répartition doit être votée à la majorité simple de l’article 24 de la loi de 1965 et peut être adoptée en même temps que des travaux d’ascenseur. Toutefois, pour qu’une modification soit effective, elle doit figurer à l’ordre du jour de l’assemblée générale des copropriétaires.

La fréquentation de l’ascenseur, un facteur souvent négligé

Un autre point souvent oublié : l’usage des lots. Un appartement situé au premier étage, mais occupé par un professionnel libéral, peut générer un trafic d’ascenseur bien plus important qu’un logement. Certains règlements prévoient donc un coefficient multiplicateur tenant compte de l’usage des lots.

De même, un copropriétaire ne peut se soustraire au paiement de sa quote-part sous prétexte qu’il ne prend jamais l’ascenseur. Inversement, un occupant du rez-de-chaussée qui emprunte régulièrement l’ascenseur pour rendre visite à un voisin ne sera pas redevable des charges (Cass. civ. 3e, 18 février 2014, n° 12-29.975). Seule l’utilité objective de l’ascenseur pour le lot est prise en compte.

Avant toute acquisition en copropriété, il est essentiel de vérifier la répartition des charges d’ascenseur et d’anticiper d’éventuelles démarches pour la corriger. Une répartition inéquitable peut entraîner des surcoûts importants, et la modification des règles en place n’est ni simple ni gratuite. Mieux vaut donc être vigilant en amont pour éviter les mauvaises surprises.

author avatar
Juridique et Droit
Collectif de retraités et d'étudiants en droit. L'objectif de cet article est de vous aider pour surtout débroussailler les problèmes juridiques, ne pas les voir trop gros et éviter de vous faire avoir par des entités qui promettent tout et n'importe quoi, surtout avec les nouvelles technologies.
A propos de La répartition des charges d’ascenseur en copropriété

Poster un commentaire ou poser une question

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer