La facture électronique obligatoire à partir de 2026-2027 ne soulève pas seulement des enjeux fiscaux et techniques. Elle pose aussi une question juridique majeure : la protection des données. Chaque facture contient des informations sensibles (données clients, montants, conditions de règlement, TVA), qui seront désormais transmises et stockées de manière systématique via des plateformes de dématérialisation. Comment ces données sont-elles protégées ? Et quelles sont les garanties offertes par le RGPD (Règlement général sur la protection des données) ?
Les données contenues dans une facture électronique
Une facture électronique ne se limite pas à une simple preuve de transaction. Elle contient :
- des données d’identification des parties (raison sociale, adresse, SIREN, coordonnées),
- des informations financières détaillées (prix, TVA, conditions de paiement),
- parfois des éléments contractuels sensibles (remises commerciales, références internes).
L’ensemble constitue un jeu de données à haute valeur économique, qui, mal protégé, peut exposer une entreprise à l’espionnage industriel ou à la fraude.
Le rôle des PDP et opérateurs de dématérialisation
Les plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) et les opérateurs de dématérialisation (OD) seront au cœur du traitement de ces factures. Elles devront garantir la sécurité et la confidentialité des flux transmis.
Mais attention : toutes ne seront pas égales. Seules les PDP sont certifiées par l’administration. Les OD, eux, interviennent comme sous-traitants techniques et devront contractuellement respecter le RGPD. Les dirigeants doivent donc examiner attentivement les engagements des prestataires en matière de protection des données.
Les obligations RGPD applicables
Le RGPD impose plusieurs obligations aux entreprises et à leurs prestataires :
- un traitement licite et transparent des données,
- une limitation des accès aux seules personnes habilitées,
- des mesures de sécurité adaptées (chiffrement, authentification forte, journalisation des accès),
- des garanties en cas de transfert de données hors Union européenne.
L’entreprise qui externalise sa facturation ne se décharge pas de sa responsabilité. En cas de violation de données, c’est elle qui reste responsable devant la CNIL.
Les risques en cas de défaillance
Une fuite ou un détournement de données de facturation peut avoir plusieurs conséquences :
- sanctions administratives (jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires mondial selon le RGPD),
- perte de confiance des clients et partenaires,
- exploitation des données par des concurrents ou des fraudeurs.
Les risques sont donc autant financiers que réputationnels. Les dirigeants doivent prendre conscience que la facture électronique ne concerne pas uniquement le fisc, mais engage aussi la cybersécurité de leur entreprise.
Les précautions à prendre dès maintenant
Pour sécuriser cette transition, il est essentiel de :
- vérifier les garanties offertes par la PDP ou l’OD en matière de RGPD,
- négocier des clauses contractuelles claires sur la responsabilité en cas de violation,
- former les équipes à la gestion sécurisée des données,
- mettre en place un plan de réponse aux incidents.
Les experts-comptables devront alerter leurs clients sur ces enjeux, et les avocats auront un rôle clé dans la sécurisation juridique des contrats.